Bittersweet World (R)

Téo se réveilla ce matin-là sans vraiment savoir où elle se trouvait, la gueule de bois comme si elle avait fait la fête toute la nuit jusqu’au petit jour – c’était d’ailleurs le cas, et elle aurait très bien pu se réveiller dans un bordel qu’elle n’aurait pas fait la différence, tant sa migraine était forte . Elle dégagea d’un coup de pied de furie les draps râpeux qui entouraient son corps de princesse – d’ailleurs, elle allait bientôt botter le cul du malotru qui avait osé la laisser coucher dans une couverture en laine – et se leva dans un bond à priori bien étudié mais qui manqua de la laisser s’étaler sur la parquet de bois noir . Ca y est, elle se souvenait enfin de la soirée de la veille, ou tout du moins de quelques brides de conversations ou morceaux fragmentés d’évènements . Elle se trouvait dans la maison du prince du Lichtenstein, et le moins qu’on puisse dire, c’est que son étonnement était grand à la simple pensée qu’un type aussi désespérément friqué – moins qu’elle quand même, la petite milliardaire (a) – puisse avoir un lit aussi anormalement normal . Elle eut un haut-le-cœur, la nausée rien qu’un moment, et l’odeur de bacon typiquement anglais accompagné de leurs horribles omelettes champignons/flageolets n’arrangea rien . La chambre était immense et déserte . Le vide se faisait clairement ressentir, et TMC comprit vite pourquoi le prince de ce putain de petit pays isolé avait tellement besoin de compagnie pour la nuit . La pièce comportait une énorme penderie de cèdre blanc, un truc de tellement mauvais goût pour un membre de la famille royale que la demoiselle fut choquée, ainsi qu’un simple bureau noir encombré de papiers, de lettres, de messages divers et de petits objets inutiles comme des punaises, des trombones ou même des flasques d’absinthe vides . Il y a avait aussi ce grand lit à baldaquin mauve qui faisait super guay et dont les draps frottaient désagréablement la peau, une petite table de nuit en planches recyclables et une étagère remplie de vieille éditions de livres chiants à mourir qui valaient quand même la modique somme de cinquante milles dollars chacun . Pour une chambre princière, c’était plutôt décevant . Il n’y avait aucune couronne ou tableau des ancêtres qui l’avaient précédés, bref, rien de royal ou qui mérite un coup d’œil . Désespérant de sortir un jour de cette foutue baraque mal agencée, loufoque et gigantesque, Téo chercha à travers la pièce le restant de ses vêtements haute-couture – oui, elle avait quand même enfilé ses dessous sexy Cosabella vu que le vieux jardinier la matait par la fenêtre d’un regard lubrique tout en passant la tondeuse – et finit par s’allonger sur le lit qui gratta de nouveau son body de sale gosse pourrie gâtée . Elle soupira un long moment, et finit par se mettre assise, en quête d’un solution . Elle voulait se tirer d’ici avant que le prince ne revienne, maintenant qu’il la dégoûtait carrément . Elle sauta d’un bond du rebord de l’édredon, s’élança vers le dressing et l’étudia de près . Il contenait les fringues du prince, mais aussi une tonne de vêtements féminins – que ses ex avaient oublié là après leur aventure, comme Téo, à moins qu’il ne se travestisse pour s’exciter lui-même . Freckles refusait de porter des habits qui avaient peut-être servi de sex toys avant, et choisit un long manteau de marin en coton, sorte de duffle-coat qui aurait pu être fashion sans cet air de satire qu’il dégageait . Elle l’enfila directement par au dessus de ses sous-vêtements, le ferma grâce à la ceinture fine et s’observa dans la glace . Sur elle, c’était carrément HOT ! Elle chercha une issue, quand soudain, des pas retentirent dans l’escalier .

« Sweetheart, je t’apportes des œufs brouillés avec ses saucisses ! »

Eurk . Rien que de penser à SA saucisse, elle avait envie de vomir . L’issue de la porte était donc impensable, ne restait plus que la fenêtre – à moins de se cacher dans le dressing, avec les trucs pervers du prince . Super, elle avait de la chance, le jardinier salasse était aller bêcher de l’autre côté du jardin, et la voie était libre . Téo inspira profondément, et ouvrit la fenêtre via la poignée, enjamba le rebord après être monté sur le canapé qui le bordait, et regarda vers le bas . C’était plutôt haut, mais sa pratique assidue de la gymnastique la sauverait probablement – ça, et les talus en bas . Elle sauta d’un coup, et atterrit par miracle pour son corps de top model sur ses jambes, au sol . Elle n’eut ensuite plus qu’à courir jusqu’à la route, et appeler un taxi de là pour qu’il la ramène à son bungalow, au camping . Mais don’t worry, elle avait quand même laissé un charmant petit mot avec son coup de la veille, par politesse .

« Je suppose que t’as volé mes fringues de créateurs pour ta collection porno . Je t’en veux pas, mais j’ai pris ton affreux manteau marin Azzedine Alaïa en échange . J’allais quand même pas me barrer à poil, tu rêves .
Gardes ta saucisse, j’en veux pas . Celle d’hier m’a donné la nausée .
XOXO,
Téo »

Une fois revenue à la civilisation, Téo prit une douche longue et chaude – avec Zac (a) . Tellement longue d’ailleurs qu’ils avaient du vidé le ballon d’eau chaude du camping pour les huit prochaine années de rentabilité . Pour ce qui est de la chaleur, ils avaient un autre moyen de la faire monter . Ce après quoi elle décida de bouger ses fesses un peu – non pas qu’elle ait de la graisse à perdre, au contraire – parce qu’elle se souvient subito de son rendez-vous dans une heure avec Hannah au terrain de tennis, pour un de leur mémorable double féminin . Merde, en plus de ça, elle avait rien à se mettre . Son armoire était pleine, quatre ou cinq valises traînaient dans le mobile home, et elle ne trouvait pas comment se vêtir . Après avoir légèrement hésité, elle attrapa au vol une jupe blanche ultra-courte et plissée Lilly Pulitzer, qu’elle agença avec un de ces adorables polos acidulés Lacoste Women en coloris jaune citron . Pas le temps de passer plus de temps à tergiverser, elle avait déjà quinze minutes de retard . Elle attrapa son sac boule Dooney&Bourke, jetta ses affaires de tennis dedans, pris ses tongs jaune Mickael Kors et fila – après avoir longuement embrassé son chéri, on peut le cocufier et l’aimer quand même (a) C’est donc peu de temps après qu’elle arriva au terrain, en même temps qu’Hannah – elles était pas HFF pour rien les copines, toutes les deux toujours supra en retard . Téo se félicita même de ne pas être arrivée plus tôt, d’abord parce que sa petite scéance de sport de couche aurait sauté – sans mauvais jeux de mots (a) – et ensuite parce que s’il y a bien une chose que la divine héritière détestait, c’était l’attente . Elle voulait tout, tout de suite . Elle envoya son sac sur le banc en plastoc situé à côté du terrain, se réjouit mentalement de ne pas voir ce crétin de prof’ de tennis présent – il matait toujours sa jupe qui se levait quand elle jouait .

« Tu devineras jamais ce qu’il m’est arrivé hier . D’ailleurs, il faut que tu m’expliques comment tu as pu , en tant qu’amie proche, me laisse repartir avec ce crado de prince du Lichtenstein après la fête »

Téo sourit, jeta une de ses balles jaunes monogrammées TMD – ses initiales – en doré dessus, et la tapota doucement avec sa raquette imprimée à son nom par Oscar de la Renta, tout en écoutant son amie de vacances . Mais ni une, ni deux, avec la chance qu’elle avait, il fallut que Miss Balai – je parles bien sûr de Tish, bonniche pas bonne officielle du camping (a) – fasse son apparition . Elle était chargée de faire le ramasse-balles . Sans le savoir, c’était elle que les bons soins de Téo avaient loués, et un tout petit peu du pognon de la fille à papa qu’était Dow irait illico presto sur le compte en banque de cette espèce de femme de ménage dénuée de classe, de vêtements autre que ceux du Proxi du coin et de sex-appeal . Merde, MERDE et re-merde . Il fallait qu’elle vienne gâcher leur après-midi entre copines . Téo pensa un moment à appeler la réception pour demander à effectuer un échange – contre Nick par exemple, ses pectoraux étaient super excitants – mais elle eut soudain une bien meilleure idée que ça . De plus, cette triple tourte à tête de cochon et corps en forme de poire pôchée – Tish hein (a) – allait encore tenté un rapprochement avec Hannah . Ces deux filles n’avaient pourtant rien à faire ensemble, et tout les séparait . Hannah était blindée de tunes, sa famille faisait parti de la haute londonienne, elle était belle et désespérément bien foutue, tout le monde la désirait et elle était toujours parmi les Front Row Girls au défilé Valentino, sans compter ses invitations gratuites partout en raison de sa beauté . Tish était pauvre et n’avait pas de vacances, elle bossait juste dans ce fichu camping de luxe . Personne ne s’intéressait à elle, elle n’avait même pas de quoi porter du Juicy Couture et devait assouvir les désirs les plus fous des clients du club pour pouvoir espérer un jour se faire faire une liposuccion et des implants mammaires palliant à son problème de seins inégaux l’un avec l’autre . Sans méchanceté, Han’ avait tout pour elle et la préposée au récurage des chiottes .. rien (a) . D’autre part, Hannah et Téo étaient amies depuis presque trois ans, correspondaient le reste de l’année et formaient un super duo une fois en vacances . Ce n’est pas une vulgaire employée qui allait tout foutre en l’air entre les deux membres du binôme mythique .

« Commences le set, Han’ . J’essaierai de pas rattraper trop de balles, histoire que l’amie des clochards sans sacs Fendi puisse faire fondre sa graisse en courant pour les ravoir . »

Oui, le moins qu’on puisse dire, c’est que Téo n’avait pas aimé les blagues douteuses de Tish à propos de McDonald .

Bittersweet World (R) Mirandachocolateedi35

Bittersweet World (R) Mirandachocolateedi38

Drop your socks and grab your mini boom box
Do the pop lock body rock
Let the beat drop
Till your shell shocked
Baby what, tell me what you got
Rock hard like a sinner block
(choco*)

Va voir ailleurs si j’y suis… se dit intérieurement Hannah. Sa mère avait été d’une relousité à mourir depuis qu’elle était partie de Londres pour débarquer au camping Paradise de Saint-Tropez. Et cela depuis à peine trois heures et demie. Il était 11h30 déjà, Hannah mourrait de faim, et mourait également d’envie de faire un tour au Proxy du camping pour s’acheter de quoi survivre jusqu’à ce que ses parents ne se décident à mettre la table et faire à manger. Ses parents ne mangeaient jamais au restaurant le plus chic du coin, non, ils s’entêtaient à vivre comme des gens de classe moyenne, à manger sur la terrasse du bungalow devant les infos de Jean-Pierre Pernault, et faire leurs courses au Leclerc entre deux français en sueur et en marcel tâché de graisse de porc. Hannah ne connaissait pas les bonnes et majordomes. Elle vivait comme une adolescente normale qui avait beaucoup d’argent et se payait beaucoup de sacs de luxe (a). C’est peut-être pour cela qu’elle se sentait proche de Tish Hamilton et qu’elle ne la considérait pas comme sa bonne. Lorsqu’elle avait besoin d’elle, ce n’était jamais pour récurer ses toilettes, mais pour aller faire un tour à la maison de la Presse regarder les magazines où faire trempette dans la Méditerranée. D’un autre côté, lorsqu’elle était en compagnie de Téo McDonald, les choses changeaient. En effet, la jeune cheeseburger, tel qu’Han la surnommait, était du genre hautaine, cassante, froide, et superficielle. Bien sûr, ce n’était là qu’une liste de ses défauts, et les qualités qui la composaient faisait d’elle un être adorable, quand on la connaissait bien entendu. Et il y avait ce petit morceau de papier de différentes couleurs, appelé argent qui avait très bien su faire la conversation entre elle lorsqu’elles se sont rencontrées deux ans plus tôt.

Finalement Hannah s’était décidé à suivre ses parents jusqu’au fameux Leclerc et s’achèterait quelque chose comme des Monster Munch dans le supermarché. Heureusement que Téo n’était pas là pour la surveiller, cette dernière lui ferait sûrement remarquer qu’un seul paquet de chips suffirait à nourrir l’Afrique toute entière et la sortir de la famine, mais ça Han’ n’en avait que faire… Pas de la faim en Afrique, hein, mais que le paquet pouvait bien la faire grossir de trois kilos dans l’après-midi. D’une, peu importait qu’elle faisait 60 kilos ou 80. Ensuite elle irait de toutes façons rencontrer la préposée sur le cour de tennis dès qu’elle eut fini de manger ou presque. Froggy lui avait déjà envoyé plusieurs messages pour lui donner rendez-vous. Elle n’attendait plus qu’une chose maintenant, revoir Eric et lui exiger des explications. Elle aurait bien esquiver le repas parental, prendre un sandwich et manger les pieds dans le sable espérant que le jeune homme fasse son apparition tel Daniel Craig dans Casino Royal, dégoulinant d’eau salée et vêtu d’un simple short de bain hyper moulant (a). Mais s’il était présent au camping cet été, il y serait pour au moins un mois voire un mois et demi, tel à son habitude. Alors un énième déjeuner devant les abeilles reproductives du Gers ou la recrudescence de la violence « Dans nos banlieeeeeuuues… » ne lui ferait pas tant de mal que cela. Et la perspective de se défouler sur quelques balles lui donnait du courage d’affronter un journal de 13 heures.

Elle n’eut même pas le temps d’envoyer un sms à Tish, pour lui demander si elle pouvait la rejoindre après la leçon de tennis que déjà sonnait l’heure de partir… Et elle n’était même pas vêtue ! Elle n’avait même pas défait ses affaires, que déjà sa chambre était envahie de sacs marins Kate Spade et d’une énorme malle Balenciaga qu’elle avait récupérer le matin même de l’aéroport, où elle avait longuement discuté avec son cousin Matéo. Cela lui avait fait énormément plaisir de le revoir et de rigoler en souvenir du bon vieux temps (a). Après un instant de réflexion intense, elle sortit donc un short rose et blanc en éponge, un t-shirt blanc où trônait juste au milieu de ses seins un « S » jaune. Là où elle voyait un « S » pour Super-Hero, d’autres esprits pervers y voyaient un « S » pour Sex… Rien de très extravagant pour une partie de tennis, peu important pour elle de montrer qu’elle avait de l’argent. Il lui fallait juste le temps de trouver sa raquette et ses balles. Cela allait lui prendre des heures. Sa mère arriva sur les entre-faits. Han roula des yeux. Juste au moment où elle allait partir, juste au moment où elle avait besoin de retrouver ses foutues affaires de tennis, sa mère se pointaient pour lui faire –sûrement – l’inventaire de ses activités de l’après-midi. A savoir, sieste, lecture de magazines inutiles sur comment faire un régime sans se priver, et finalement irait à la piscine. C’était comme ça tous les jours de toutes les vacances qu’elle passait ici. Rhaaaaa, barre-toiiii ! pensa-t-elle. Voyant que sa fille était agacée, Mrs. Delaney se contenta de lui indiquer que les affaires de sports étaient toutes rangées dans le placard. Ainsi que sa raquette. Et elle n’aurait pas pu lui dire plus tôt ??? Voilà un quart d’heure que Heaven devrait être partie. Elle se rua sur le dit placard et attrapa son sac de tennis et fila vers le court. En chemin elle chaussa ses lunettes de soleil sur son petit nez, enfila un bracelet en éponge et sortit son portable. Déjà 14h15. Hannah cultivait l’art d’être en retard et ceci n’était pas pour plaire à tout le monde. Mais d’un autre côté, elle se doutait que la jeune héritière des fast-foods - avec un héritage comme le sien, on comprend son aigreur à tout va (a) – arriverait à la même heure que la jeune Delaney, si ce n’est même plus tard. Avant de commencer la partie de tennis, Hannah fit quelques étirements alors que Téo commençait à sortir ses affaires. Heaven leva un sourcil lorsque la mini brunette lui racontait sa soirée de la veille.

Ma chérie, il t’a fait un lavage de cerveau ce soi disant prince ou quoi ? Ca fait à peine trois heures que je suis arrivée… Et que je supporte ma mère surexcitée par les vacances…

Mais TMD ne l’écoutait plus. Elle avait reporté son attention sur une jeune fille qui venait de faire son apparition. En l’occurrence, Tish, la vieille amie de mademoiselle Delaney. Hannah avait déjà remarqué l’étrange expression dans le visage de Téo, à la fois mi agacée et mi amusée. Depuis qu’elle connaissait les deux jeunes filles, elle savait que les deux ne se supportaient pas. Et qu’est-ce que ça pouvait amuser Han. Les voir s’entretuer à coup de remarques acides, rien de mieux pour avoir sa dose de bonheur quotidien. Elle ne faisait rien pour les empêcher, c’était bien mieux de les écouter.

Tiiish ! cria-t-elle presque en s’approchant vers elle et lui faisant la bise, à la française. Mais sous l’empressement de miss Maccies à vouloir commencer le jeu, Han n’eut d’autres options que de s’exécuter et laisser la jeune Hamilton retourner à ses occupations, ramasser les balles. Et celle-ci allait certainement en baver, connaissant l’adversaire qu’elle avait en face d’elle. Peu importe, elle irait la réconforter après le match en lui payant un verre au bar.

Ca ne devrait pas de demander trop d’effort, Darling, répondit la jeune fille à la remarque cynique qu’elle venait de lancer en direction de Tish. Elle se fendit d’un sourire pour ne pas la froisser, même si, de toute façon, c’était inutile, Téo et Han s’amusait à se lancer des piques depuis qu’elles se connaissaient. En toute amitié bien sûr. (a)